– Dis-moi, pourquoi les éléphants ?

– Quels éléphants ?

– Ben… sur la bannière de ton blog !

– Ha oui… les éléphants ! Et bien voilà, il était une fois un éléphant qui… (non, je plaisante !)

Effectivement, à la réflexion, je reconnais que ce choix peut paraître saugrenu.

A l’évidence, ce blog n’a rien à voir avec un reportage sur un safari au Kenya, vous n’y trouverez pas non plus un quelconque article sur les us et coutumes des guerriers Massaï et pas davantage de photos sur la savane africaine.

En revanche vous pouvez y voir des cartes « Made in Mimi » et lire quelques billets d’humeur.

Aucune corrélation avec les éléphants.

Alors ?…

En fait, c’est simple, cet animal m’émeut (hein ? non, lui, il vit en Australie, rien à voir !), il m’émerveille, je suis en totale admiration devant ce mastodonte au calme olympien et à la démarche de danseuse.

Il émane d’eux une sorte de force tranquille comme si rien ne pouvait leur arriver. Ils sont aussi réputés pour avoir une sensibilité rare chez les animaux, sans compter leur légendaire mémoire et leur grande intelligence, particulièrement celle de comprendre qu’être le plus fort ne donne qu’un seul droit : celui de protéger les plus faibles. Ah, si nous, les humains, pouvions en prendre de la graine !

Et c’est tellement beau un éléphant. Je le trouve majestueux, impressionnant et néanmoins terriblement attendrissant. Sauf quand il charge, oui bien sûr. Mais ne m’étant jamais encore trouvée sur la trajectoire d’un éléphant courroucé… je ne peux pas vous dire qu’elle serait mon sentiment, après.

D’ailleurs je me dis que s’il charge, c’est qu’il a une bonne raison pour le faire et on n’a pas à se trouver dans sa ligne de mire, un point c’est tout. Oui, cela s’appelle de la mauvaise foi ce que je viens d’écrire. Mais, j’assume.

Et puis un jour, je suis tombée sur ce récit « L’éléphant enchaîné » et là !… REVELATION ! Je me suis sentie soudainement, très, très proche de lui et c’est à ce moment que je crois avoir compris pourquoi je les aimais tant.

Extrait :

Quand j’étais petit, j’adorais le cirque, et ce que j’aimais par-dessus tout, au cirque, c’était les animaux. L’éléphant en particulier me fascinait ; comme je l’appris par la suite, c’était l’animal préféré de tous les enfants. Pendant son numéro, l’énorme bête exhibait un poids, une taille et une force extraordinaires… Mais, tout de suite après et jusqu’à la représentation suivante, l’éléphant restait toujours attaché à un petit pieu fiché en terre, par une chaîne qui retenait l’une de ses pattes prisonnière.

Or ce pieu n’était qu’un minuscule morceau de bois à peine enfoncé de quelques centimètres dans le sol. Et bien que la chaîne fût épaisse et résistante, il me semblait évident qu’un animal capable de déraciner un arbre devait facilement pouvoir se libérer et s’en aller.

Le mystère reste entier à me yeux.

Alors, qu’est-ce qui le retient ?

Pourquoi ne s’échappe-t-il pas ?

A cinq ou six ans, j’avais encore une confiance absolue dans la science des adultes. J’interrogeai donc mon maître, un père ou un oncle sur le mystère du pachyderme. L’un d’eux m’expliqua que l’éléphant ne s’échappait pas parce qu’il était dressé.

Je posai alors la question qui tombe sous le sens : « S’il est dressé, pourquoi l’enchaîne-t-on ? »

Je ne rappelle pas qu’on m’ait fait une réponse cohérente. Le temps passant, j’oubliai le mystère de l’éléphant et de son pieu, ne m’en souvenant que lorsque je rencontrais d’autres personnes qui un jour, elles aussi, s’étaient posé la même question.

Il y a quelques années, j’eus la chance de tomber sur quelqu’un d’assez savant pour connaître la réponse :

L’éléphant du cirque ne s’échappe pas parce que, dès son plus jeune âge, il a été attaché à un pieu semblable.

Je fermai les yeux et j’imaginai l’éléphant nouveau-né sans défense, attaché à ce piquet. Je suis sûr qu’à ce moment l’éléphanteau a poussé, tiré et transpiré pour essayer de se libérer, mais que, le piquet étant trop solide pour lui, il n’y est pas arrivé malgré tous ses efforts.

Je l’imaginai qui s’endormait épuisé et, le lendemain, essayait à nouveau, et le surlendemain… et les jours suivants, jusqu’à ce qu’un jour, un jour terrible pour son histoire, l’animal finisse par accepter son impuissance et se résigner à son sort.

Cet énorme et puissant pachyderme que nous voyons au cirque ne s’échappe pas, le pauvre, parce qu’il croit en être incapable.

Il garde le souvenir gravé de l’impuissance qui fut la sienne peu après sa naissance.

Et le pire, c’est que jamais il n’a sérieusement remis en question ce souvenir.

Jamais, jamais il n’a tenté d’éprouver à nouveau sa force…

C’est ainsi ! Nous sommes tous un peu comme l’éléphant du cirque : nous allons de par le monde attaché à des centaines de pieux qui nous retirent une partie de notre liberté.

Nous vivons avec l’idée que « nous ne pouvons pas » faire des tas de choses, pour la simple raison qu’une fois, il y a bien longtemps, quand nous étions petits, nous avons essayé et n’avons pas réussi.

Alors, nous avons fait la même chose que l’éléphant, et nous avons gravé en nous :  » Je n’en suis pas capable et jamais je n’en serai capable ».

(L’éléphant enchaîne, de Jorge Bucay)

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Je ne sais pas si j’ai été, dans une vie antérieure un éléphant de cirque, mais si un jour je devais me réincarner, je sais quel serait mon choix et, ce coup là, je resterai bien planquée dans la savane !